La prière mentale — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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La prière mentale

Puisque la contemplation est l’union de notre esprit et de notre volonté à Dieu dans un acte d’amour pur qui nous permet une connaissance obscure de Lui Tel qu’Il est véritablement, le moyen d’y parvenir est de perfectionner notre esprit, notre volonté et notre âme toute entière.

Le but d’un livre de méditations est de nous apprendre à penser, et non de penser pour nous. Par conséquent si nous prenons un tel livre et que nous nous contentons de le lire du début jusqu’à la fin, nous perdons notre temps. Dès qu’une pensée nous stimule l’esprit ou le cœur nous pouvons laisser le livre, parce que notre méditation est commencée. Nous croire obligés de suivre l’auteur jusqu’à sa propre conclusion serait une grave erreur : peut-être ne s’applique-t-elle pas à nous, et Dieu veut-Il nous voir aboutir à autre chose. Il a peut-être décidé de nous accorder une grâce très différente de celle dont l’auteur juge que nous avons besoin.

Certains ne méditent que lorsque l’ouvrage est explicitement intitulé « Méditations ». S’il avait un autre titre, ils le liraient sans essayer de réfléchir.

Le mieux, pour ceux qui débutent dans la vie spirituelle, après avoir réellement acquis la discipline d’esprit qui leur permettra de se concentrer sur un projet spirituel, d’approfondir sa signification et de l’incorporer à leur vie, c’est d’acquérir l’agilité et la liberté d’esprit qui les aidera à trouver la lumière, la chaleur, les idées et l’amour de Dieu, où qu’ils aillent et quoi qu’ils fassent. Ceux qui ne peuvent penser à Dieu qu’à certaines heures fixes de la journée n’avanceront jamais bien loin dans la vie spirituelle.

En réalité, ils ne penseront même pas à Lui aux heures qu’ils ont scrupuleusement réservées à la « prière mentale ».

Apprenons à méditer sur le papier. Le dessin et l’écriture sont des formes de méditation. Apprenons à contempler les œuvres d’art, à prier dans les rues ou dans la campagne. Apprenons à méditer non seulement un livre à la main, mais en attendant l’autobus ou en voyageant dans le train. Et, surtout, entrons dans la liturgie de l’Eglise et que le cycle liturgique fasse partie de notre vie – que son rythme pénètre notre âme et notre corps.

La méditation est une discipline double, qui a un double rôle. Elle doit, d’abord, nous permettre de contrôler suffisamment notre esprit et notre mémoire, de nous recueillir, de nous détourner des choses extérieures, des affaires, des activités, des pensées et des soucis de l’existence temporelle. Ensuite – et c’est là son véritable but – elle nous apprend à prendre conscience de la présence de Dieu ; et surtout à demeurer dans un état presque constant d’attention aimante et de confiance à l’égard de Dieu.

Le véritable but de la méditation est donc le suivant : nous apprendre à nous libérer des choses créées et des préoccupations temporelles dans lesquelles nous ne trouvons que désarroi et peine, et à entrer en contact avec Dieu par une prise de conscience aimante qui nous dispose à recevoir de Lui l’aide dont nous avons tant besoin, et à Lui rendre la louange, les honneurs, l’action de grâces et l’amour que nous sommes maintenant heureux de Lui offrir.

Thomas Merton, Semences de contemplation (extraits)
Traduction par Marie Tradié, Editions du Seuil (1963) p.161-164