Immaculée conception de la Vierge Marie
Scourmont, 8 décembre 2018
Gn 3, 9-15.20 - Ps 97
Ep 1, 3-6.11-12 – Lc 1, 26-38
Introduction
En août 1981, le frère Henri Vergès, frère mariste, participait à une retraite. À la suite de la première instruction du matin, il écrivait dans ses notes (archives inédites) :
« Son Immaculée Conception correspond à notre baptême ...
Immaculée Conception de la Vierge Marie
Introduction
En août 1981, le frère Henri Vergès, frère mariste, participait à une retraite. À la suite de la première instruction du matin, il écrivait dans ses notes (archives inédites) :
« Son Immaculée Conception correspond à notre baptême.
Différence : en Marie sainteté originelle et, de plus, la naissance historique de Marie précède le mystère pascal.
Don gratuit : Marie n’y est pour rien à l’origine, il a plu à Dieu qu’il en soit ainsi. Mais Marie a fait fructifier le don de Dieu. Chez Marie nature et grâce ne font qu’un : mais notre mère a cheminé comme nous dans les ténèbres de la foi. Même ce privilège rapproche Marie de l’homme : mère des pécheurs parce que sans durcissement de péché. »
Dans quelques heures, avec 18 autres martyrs en terre d’Algérie, le frère Henri sera déclaré solennellement bienheureux. Pour vivre en communion avec tous ceux qui sont à Oran aujourd’hui, je vous propose de méditer simplement ces notes du frère Henri.
1. Immaculée Conception et baptême
« Son Immaculée Conception correspond à notre baptême. Différence : en Marie sainteté originelle et, de plus, la naissance historique de Marie précède le mystère pascal. » Si chaque personne humaine retrouve, par le baptême, la vie de communion complète avec Dieu, perdue par le péché, Marie n’a pas eu besoin du baptême : dès sa conception, Dieu l’a établie dans la sainteté ; il a comme anticipé ce qui est l’effet du baptême. Notre sainteté à nous est une victoire sur le péché qui blesse chaque être humain ; la sainteté de Marie, elle, est la préservation du combat, car elle tient le péché à l’écart de cet être consacré à Dieu, consacré par Dieu. Pour chacun de nous, c’est la participation au mystère pascal du Christ qui nous remet dans l’intimité avec Dieu. Mais pour Marie, comme pour son Fils, Jésus, la participation au mystère pascal – mystère de mort qui débouche dans la résurrection – n’est pas remise dans l’intimité avec Dieu, qu’elle n’a jamais perdue, mais consécration de cette intimité.
2. Le don de Dieu à faire fructifier dans la maternité pour Marie et pour nous
« Don gratuit : Marie n’y est pour rien à l’origine, il a plu à Dieu qu’il en soit ainsi. Mais Marie a fait fructifier le don de Dieu. Chez Marie nature et grâce ne font qu’un. » Chez Marie, la gratuité du don de Dieu est encore plus flagrante que chez nous, puisqu’elle est « sanctifiée » avant même de naître. Mais cela nous rappelle que, pour nous, tout don de Dieu est absolument gratuit. Nos bonnes œuvres ne font que confirmer le don reçu et le fait que nous sommes prêts à l’assumer, à le mettre en œuvre dans notre vie, comme Marie elle-même l’a vécu. Devenir mère, pour Marie, s’inscrivait dans la droite ligne de ce qu’elle vivait depuis toujours. Si, à l’Annonciation, elle a posé une question à l’ange Gabriel, elle n’a jamais douté de l’origine de la demande qui lui était faite et de la réponse qu’elle devait y apporter. Chacun de nous est aussi appelé à devenir « mère » de Jésus, à laisser Jésus « s’incarner » en lui, si l’on peut dire, à laisser Jésus envahir sa vie et tout son être, jusqu’à ne plus être qu’un autre Jésus. Laisser Jésus naître en soi, pour ne plus être qu’en lui et pour lui : tel est le but de notre vie chrétienne, et que certains ont le privilège d’expérimenter déjà sur cette terre.
3. Les ténèbres de la foi
« Chez Marie nature et grâce ne font qu’un : mais notre mère a cheminé comme nous dans les ténèbres de la foi. Même ce privilège rapproche Marie de l’homme : mère des pécheurs parce que sans durcissement de péché. » Marie peut être la mère des pécheurs, parce qu’elle-même n’a jamais subi le péché dans sa vie : elle est la preuve qu’une vie humaine sans péché est possible. Nous, nous savons que le péché n’est pas seulement à notre porte, mais qu’il marque, d’une empreinte potentiellement destructrice, toutes les fibres de notre être spirituel. Nous sommes toujours dans les ténèbres de la foi, témoins et parfois acteurs de la lutte entre le bien et le mal en nous et autour de nous. Marie est notre mère ; elle n’ignore rien de ces combats, mais la force de Dieu en elle l’a éloignée du « durcissement du péché ». Sans péché, elle est la mère de ceux qui ont été affranchis du péché par le baptême.
4. La prière de Sœur Odette
Pour terminer, je ne parlerai pas de nos chers frères de Tibhirine, car nous les connaissons bien et, pour moi, ils sont presque trop proches pour en dire quelque chose. Je préfère me laisser interroger en silence par leur destinée chrétienne tragique et glorieuse.
Mais j’aimerais tout de même citer une prière, qu’une autre bienheureuse de ce jour, Sœur Odette Prévost, Petite Sœur du Sacré-Cœur, portait sur elle le jour de sa mort violente, le 10 novembre 1995. On n’en connaît pas l’auteur, mais, si elle-même n’a pas composée cette prière, elle l’a sûrement faite sienne :
« Vis le jour d’aujourd’hui, Dieu te le donne, il est à toi. Vis-le en Lui. Le jour de demain est à Dieu, Il ne t’appartient pas. Ne porte pas sur demain le souci d’aujourd’hui. Demain est à Dieu, remets-le Lui. Le moment présent est une frêle passerelle. Si tu le charges des regrets d’hier, De l’inquiétude de demain, La passerelle cède et tu perds pied. Le passé ? Dieu le pardonne. L’avenir ? Dieu le donne. Vis le jour d’aujourd’hui en communion avec Lui. Et s’il y a lieu de t’inquiéter pour un être aimé Regarde-le dans la lumière du Christ ressuscité. »
Ne nous inquiétons plus pour ces martyrs bien aimés : ils sont désormais bienheureux dans la lumière du Christ ressuscité, avec Marie et tous les saints, et nous tous, nous aspirons seulement à les rejoindre bientôt. « Viens, Seigneur Jésus. »
Frère Gérard ocso 2018