Etre et agir — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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Etre et agir


Mon âme ne se découvre que dans l’action. Elle doit donc agir. La stagnation et l’inaction amènent la mort spirituelle.

Être et agir

Mon âme ne se découvre que dans l’action. Elle doit donc agir. La stagnation et l’inaction amènent la mort spirituelle. Mais mon âme ne doit pas se jeter entièrement dans les effets extérieurs de son activité. Je n’ai pas besoin de me « voir », mais « d’être ».

Les hommes sont avides de se voir au lieu de se contenter d’être, parce qu’ils ne croient pas vraiment à leur propre existence, parce qu’ils ne croient pas en Dieu.  Ceci est également vrai de ceux qui affirment croire en Dieu (sans mettre leur foi en pratique) et de ceux qui ne prétendent même pas y croire. Dans les deux cas, le manque de foi implique en même temps une perte totale de tout sens du réel. Être ne signifie rien pour ceux qui haïssent et redoutent la vie. Aussi ne trouvent-ils aucune paix dans leur propre réalité (qui reflète celle de Dieu).

La contemplation de soi-même conduit au plus terrible désespoir : le désespoir d’un dieu qui se hait mortellement. C’est l’ultime perversion d’un homme créé à l’image et à la ressemblance du vrai Dieu, pour aimer éternellement et parfaitement un bien infini – un bien (notez ceci) qu’il devait trouver « en lui ! ». Pour trouver Dieu en nous, cessons de nous regarder, de nous ausculter et de nous contrôler dans le miroir de notre propre futilité, heureux d’être en Lui et de faire ce qu’Il veut, selon nos forces, jugeant nos actes non à la lumière de nos illusions, mais de Sa réalité qui nous entoure dans les êtres et les choses au milieu desquels nous vivons.

Tout homme cherche d’abord à être en paix avec soi-même. Or nous ne trouvons pas naturellement le repos en nous. Il nous faut apprendre à nous recueillir avant de pouvoir communiquer avec Dieu et les hommes.

Notre destinée chrétienne est, en fait, très grande : mais nous n’atteignons la grandeur que si elle nous importe peu. Il est donc très important d’être petit, c’est-à-dire d’être soi-même. Alors perdons cette gêne futile qui nous pousse à nous comparer perpétuellement aux autres pour mesurer notre importance.

La valeur de notre activité dépend presque entièrement de l’humilité qui nous fait nous accepter tels que nous sommes. Ne mesurons pas la valeur de notre être à la violence de nos expériences. La turbulence d’esprit est un signe de faiblesse spirituelle.

 Connaissons notre pauvreté pour apprécier notre richesse. Mais surtout, connaissons notre faiblesse pour susciter une façon nouvelle « d’être et d’agir » et sentir Dieu Lui-même accomplissant en nous ce que nous jugeons impossible.

 

                                                            Thomas Merton, Nul n’est une île (extraits chap.7).

                                                                       Traduction Marie Tadié. Le Seuil 1956.