L'Ascension 3 — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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L'Ascension 3

Evangile et peinture

L'Ascension Extraits de Sermons de Bernard de Clairvaux (sermon 2) et Guerric d'Igny



Bernard de Clairvaux

Second sermon pour le jour se l’Ascension. (extraits)

   La solennité de ce jour, mes frères, est glorieuse en même temps que joyeuse, si vous me permettez de le dire. En ce jour, en effet, le Christ reçut une gloire unique, et nous, nous trouvons un sujet tout particulier de joie. Elle est la clôture, l’achèvement de toutes les autres fêtes chrétiennes et l'heureux terme du pèlerinage du Fils de Dieu ici-bas. En effet, c'est le même qui descendit sur la terre, qui remonte aujourd'hui au plus haut des cieux, afin d'accomplir toutes choses (Ep 4,10). Après avoir montré qu'il est le maître de tout ce qui est sur la terre, au fond de la mer et dans les enfers, il ne lui restait plus qu'à montrer de même, ou plutôt, par des preuves plus convaincantes encore, qu'il est le maître des airs. La terre, en effet, avait reconnu son Sauveur, lorsqu'à ce cri puissant, tombé de ses lèvres: « Lazare, sors dehors (Jn 11,43), » elle rejeta un mort de son sein. La mer le reconnut aussi, lorsqu'elle se fit solide sous ses pas le jour où ses disciples le prenaient pour un fantôme (Mt 14,25). Enfin, les enfers le reconnurent pour leur maître et Seigneur, le jour où il rompit leurs portes de fer (Ps 106,16), et brisa leurs gonds d'airain, le jour, dis-je, où il garrotta l'homicide dont la rage est insatiable, le diable, dis-je, Satan (Ap 20,2) Oui, celui qui ressuscita les morts, guérit les lépreux, rendit la vue aux aveugles, fit marcher droit les boiteux, et, d'un souffle mit en fuite tout le cortège de nos infirmités, s'est montré le maître de toutes choses, en restaurant toutes celles qui s'étaient détériorées, de la même main qui les avait créées. De même, il a bien prouvé qu'il était le Seigneur de la mer et de tout ce qui se meut dans son sein, quand il prédit à son disciple qu'il trouverait une pièce d'argent dans le ventre du poisson qu'il allait prendre (Mt 17,26). Enfin, quand il a traîné à sa suite les puissances de l'air et les a attachées à sa croix (Col 2,14), il a montré qu'il avait plein pouvoir sur les puissances infernales. Il a passé, en effet, en faisant le bien, et en délivrant les possédés du démon, ce Jésus qui, dans un lieu champêtre, instruisait la foule qui le suivait et devant son juge, se tenait debout pour recevoir un soufflet, et qui, pendant tout le temps qu'il passa sur la terre, vécut parmi des hommes, toujours debout malgré d'innombrables fatigues, et opérait notre salut au milieu de la terre.

    Et maintenant, Seigneur Jésus, pour mettre la dernière main à ta tunique sans couture, pour donner à l'édifice de notre foi son couronnement, il ne reste plus qu'à te montrer le maître des airs à tes disciples, en t’élevant, à leurs yeux, dans le ciel. Alors, il sera évident pour eux que tu es le Seigneur de toutes choses, puisque, tu auras accompli tout en toutes choses, et c'est alors que tout genou devra fléchir à ton seul nom dans les cieux, sur la terre et dans les enfers, et toute langue proclamer que tu es dans la gloire assis à la droite du Père (Ph 2,10). A cette droite, se trouvent des délices sans fin. Quand l'Apôtre nous exhorte à rechercher les choses qui sont dans le ciel, où Jésus-Christ est assis à la droite de Dieu (Col  3,1), c'est parce que c'est là qu'est Jésus-Christ, notre trésor, celui en qui sont cachés tous les trésors de la sagesse et de la science, parce que c'est en lui que la plénitude de la divinité habite corporellement (Col 2,3-2,9).

 

 

 

 

 

 

Guerric d’Igny

Sermon pour l’Ascension du Seigneur. (extraits)

    « Père, lorsque j'étais avec eux, je les gardais en ton nom (Jn 17,12). » Le Seigneur fit cette prière avant le jour de sa Passion. On peut cependant l'appliquer avec quelque à-propos au jour de l'Ascension, lorsque Jésus était sur le point de se séparer de ses petits enfants qu'il recommandait à son Père. Car celui qui a créé, qui éclaire et conduit, dans les cieux, la multitude des anges, avait réuni, autour de lui, une petite troupe de disciples pour les instruire sous les yeux de sa sainte humanité, jusqu'à ce que, devenus grands par les sentiments, ils fussent capables de recevoir l'esprit de discipline. Ce grand maître aimait donc d'un grand amour ces petits enfants, car, après les avoir détachés de l'amour du monde et leur avoir fait abandonner tout espérance dans le siècle, il voyait qu'ils ne dépendaient que de lui seul. Cependant, tant qu'il resta corporellement avec eux, il ne leur fit voir ni facilement, ni par de nombreux témoignages, l'affection qu'il avait pour eux. Il se montra envers eux plutôt grave que tendre, comme il convient à un maître et à un père. Mais lorsque le temps de se séparer d'eux fut venu, il parut comme vaincu par sa vive tendresse, et ne put leur dérober davantage la grandeur de son amour, qu'il leur avait cachée jusqu'alors. De là vient « qu'ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin (Jn 13,1).  Il leur donna le sacrement de son corps et de son sang avec le pouvoir de le reproduire en donnant  cette nouvelle présence. S’il se séparait d'eux de corps en apparence, par l'effet du sacrement il restait non seulement avec eux, mais encore en eux.  Dans sa bonté ineffable, il lava les pieds de ses disciples pour leur donner un exemple de salut et un sacrement de rémission de leurs fautes.

    Alors enfin, après une exhortation prolongée, il les recommande à son Père, lève les yeux au ciel, et dit entre autres choses : « Père, lorsque j'étais avec eux, je les gardais en ton nom, et nul d'entre eux ne s'est perdu, si ce n'est le fils de la perdition. Maintenant je viens à toi. Garde en ton nom ceux que tu m'as donnés. Je ne te prie pas de les retirer du monde, mais de les protéger du mal (Jn 17,15), » et le reste du passage, car ce n'est point le lieu de le rendre ici, encore moins de l'expliquer. L'abrégé de ce discours, comme sa lecture l'indique, consiste en ces trois choses qui constituent le salut et même la perfection, tellement qu'on n'y peut rien ajouter : « Qu'ils soient préservés du mal, sanctifiés en vérité, et glorifiés avec lui. » « Père, s'écrie-t-il, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient aussi pour voir ma gloire. » Ô heureux apôtres ! Leur avocat est leur juge, pour eux intercède celui qui doit être adoré au même titre que l'est celui à qui il adresse ses prières. Le Père ne le frustrera point du désir que lui manifestent ses lèvres, car il a avec lui une même volonté et un même pouvoir, étant un seul et même Dieu avec lui. Tout ce que le Christ demande doit nécessairement s'accomplir : ses paroles sont puissance, et sa volonté est effet accompli. A propos de toutes ces créatures qui existent, « il a dit et tout a été fait, il a commandé et tout a été créé (Ps 33,9). » « Je veux, dit-il, que là où je suis, ils se trouvent eux aussi. » Ô quelle sécurité pour les fidèles, quelle confiance pour ceux qui croient ! Mais qu'ils prennent garde de ne pas rejeter la grâce qu'ils ont reçue. Ce n'est pas, en effet, aux apôtres seuls ou aux disciples qui étaient avec eux qu'une telle assurance a été donnée, mais à tous ceux qui, par leur ministère, devaient croire en la parole de Dieu. « Je ne prie pas pour eux seuls, dit le Seigneur, mais pour ceux qui, par leur prédication, croiront en moi. »

    C'est de là que vous tirez votre origine, là que vous avez votre Père et votre héritage, de là que vous attendez le Sauveur.