Ne murmurez pas — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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Ne murmurez pas

Ne murmurez pas

1 Co 10,10 - » Règle de saint Benoît Chapitre 4,39

Le murmure est quelque chose de concret qui consiste à parler doucement, à voix basse mais il a aussi un sens figuré qui fait que l’on bougonne, grommelle, grogne, ronchonne, maugrée, récrimine, critique négativement. Le premier sens et le second peuvent se cumuler et marquer un désaccord avec une tâche à accomplir ou avec son environnement. Dans tous les cas le murmure est une manière personnelle de s'exprimer et de montrer une rupture dans la communion de personnes ou d'un groupe. Il est une forme de refus d'acceptation de ce qui est proposé. Il exprime un ressentiment, une rancune, manifeste la mauvaise humeur. Il sort du cœur de l'homme. Destructeur, il peut être générateur de rumeur. Dans son livre La voie du chrétien dans le monde (Editions du Cerf, 2010, page 125) à propos de l’autorité et de son lien avec l’obéissance, Esther de Wall définit le murmure comme « une conversation intérieure par laquelle je rumine telle remarque qui m'a peinée, ou tel événement que je n'avais pas mérité, ou un affront que je ne peux oublier, et je continue à me répéter « ce n'est pas juste ». Alors, ce qui n'était au début qu'une petite rancune est devenue, par mes soins, un gros nuage menaçant qui étouffe tout mon paysage intérieur ».

Le murmure est toujours dirigé contre quelqu'un ou une institution. D’abord inacceptation, il révèle un état de désobéissance par rapport à ce qui nous est demandé. Inscrit dans le cœur de l'homme, il se manifeste toujours par rapport à quelque chose qui apparaît comme frustrant, désagréable. La marche dans le désert du peuple hébreu est marquée de murmures contre Moïse à propos de la soif (Ex 15,24 ; 16,3), de la faim (Ex 16,2), de la peur de la guerre (Nb 14,4). Dans le Nouveau Testament des pharisiens murmurent contre Jésus en cherchant comment le faire mourir car il est un gêneur déstabilisant qui vient bouleverser les idées reçues, l'ordre établi (Mt 20,1-16 ; Lc 15,2 ; Jn 6,41).

Benoît connaît bien le cœur de l'homme et douze fois dans la Règle après avoir montré le chemin de vie, dans les instruments des bonnes œuvres il nous dit qu'il ne faut pas murmurer (RB Chap. 4,39). Le murmure est souvent associé à l’orgueil qui est le contraire de l’humilité. Il peut prendre sa source dans tout ce qui nous touche. Il exclut de la communion avec les autres en rompant l’harmonie, l'unité par désobéissance (RB Chap. 5,13). Il peut s'exprimer par des paroles mais aussi être dans le cœur, l'obéissance n'est alors qu'apparente (RB Chap. 5,14 ; 17-19) et l'orgueil tout proche (RB Chap.23,1) ainsi que la jalousie (RB Chap.34,6). Il faut en communauté, en groupe ou en famille ne pas surcharger l'un ou l'autre, car cette surcharge qui déséquilibre est à l’origine du murmure pour celui qui subit (RB Chap. 35,13; 53,18). Il surgit aussi dans le manque (RB Chap. 40,9). Quelle que soit sa forme le murmure est un mal (RB Chap. 34,6-7). L’obéissance à Celui que nous cherchons, obéissance à Celui et à ceux qui nous indiquent le chemin, libère, et évite le murmure (RB Chap. 41,5).

Le murmure qui naît dans le cœur de l'homme est toujours le signe d'un dysfonctionnement dans une relation, à soi-même, à quelqu'un ou à un groupe. Encombrant la conscience, il est un obstacle à toute vie spirituelle. Il nous faut apprendre à le reconnaître à sa naissance en nous, le déraciner avant qu'il ne soit la cause de terribles dégâts pour soi et pour les autres quand il devient rumeur.

Une oreille jalouse écoute tout,
la rumeur même des murmures ne lui échappe pas.
Gardez-vous de vains murmures,
préservez votre langue des mauvais propos;
la parole la plus furtive ne demeure pas sans effets
Sg 1,10-11

Agissez en tout sans murmures ni contestations,
afin de vous rendre irréprochables et purs,
enfants de Dieu sans tache au sein d'une génération dévoyée et pervertie,
d'un monde où vous brillez comme des foyers de lumière
en lui présentant la Parole de vie.
2 Ph 2,14