Le temps et la Règle — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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Le temps et la Règle

Le temps et la règle de saint Benoît

On peut appréhender le temps comme un espace, cet espace se nommant durée ou histoire. Cette durée est un espace organisé, rythmé, mesurable et mesuré par l’heure, le jour, la nuit, la semaine, les mois, les années, les siècles. Cette structure de base est rythmée par les saisons qui correspondent à un cycle : printemps, été, automne et hiver ou naissance, croissance, maturité, déclin, mort, re-naissance, re- croissance etc. Le temps se déroule à la fois comme un cycle ou des évènements se répètent, mais il a en même temps un aspect linéaire et continu en ce sens que ce qui est passé ne se renouvellera plus. On peut illustrer cela en disant par exemple que lorsqu’on regarde couler l’eau d’une rivière, l’eau qui passe est à la fois la même et est toujours différente. Le temps est une combinaison d’événements cycliques qui se déroulent dans une certaine linéarité et une continuité, un peu comme une roue qui se déplace sur le sol. Elle tourne sur elle-même en même temps qu’elle avance.

Le mot temps fait partie du langage quotidien. On dit : prendre son temps, se donner du temps, gagner du temps, prendre du bon temps, perdre son temps, le temps c’est de l’argent, donner de son temps, ne pas avoir le temps, être pressé par le temps, passer le temps, faire son temps, tenir son emploi du temps …

Le temps est un donc un espace de vie créé par Dieu au commencement (Gn 1,5). L’histoire chrétienne fait partie de la longue histoire de l’humanité et le Christ s‘est inséré physiquement dans le temps. Il est né d’une femme, a tout connu de la vie humaine. Il a enseigné, est mort crucifié et est ressuscité. La Résurrection donne du sens au temps. Toute vie et donc toute action se trouve orientée vers un a-venir.

La Règle de saint Benoît nous propose une manière de vivre dans ce temps qui nous est donné en fonction de la finalité de la vie chrétienne : vivre avec d’autres en allant à la rencontre de Dieu. Dès le Prologue Benoît nous place dans le présent (Prol 3), nous invite à ouvrir les yeux à la lumière divine et à être attentif chaque jour à la voix de Dieu (Prol 9-13). Il propose de s’engager résolument par l’obéissance à combattre pour le Seigneur Christ (Prol 3, 40). En effet le Seigneur attend que chaque jour nous répondions par des actes à son appel (Prol 35). il nous faut courir et agir de manière à être utile à notre éternité (Prol 44). Dieu nous connaît, est avec nous, non pas à chaque instant mais bien plus encore dans tous les instants, toujours et partout (RB 7, 10-30). Ainsi, face au temps qui passe, qui nous presse, au temps qui dure et qui peut être lourd à vivre, Benoît nous interpelle en nous décrivant un temps utile, à taille humaine, organisé, habité, priant, qui respecte les heures du jour et des saisons pour aller à l’Essentiel qu’est la recherche de Dieu là où nous sommes.

La pratique de la Règle de saint Benoît restaure en nous le temps, elle rassemble insensiblement dans la durée tous nos instants dispersés… les rythmes quotidiens se suivent dans un perpétuel recommencement et l’alternance entre les saisons, le jour et la nuit, entre travail manuel et lectio divina, nous maintient toujours en état d’alerte. Le temps n’est jamais vide ni attente stérile. Le nouveau venu apprend tout de suite à attendre et la stabilité authentifie sa démarche, tandis que l’instabilité démasque l’illusion du gyrovague ; la conversion a lieu dans l’instant et la stabilité la confirme dans la durée…
(Sabine Vantroys, ocso, in Collectanea Cisterciensia Tome 73-2011-3, p.455)

Par sa Règle où le temps est planifié en vue d’un but, Benoît nous fait prendre conscience que celui qui veut se mettre à l’école du service du Seigneur qui l’attend doit apprendre à structurer son temps, à travailler, à combattre (Prol 3) en fonction d’une seule finalité : habiter la maison du Seigneur (Prol 22).