La joie de la Résurrection — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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La joie de la Résurrection

« Le Seigneur est ressuscité ! » Qui donc serait assez tiède, assez nonchalant pour entendre aujourd’hui ce cri joyeux sans être tout entier soulevé de bonheur, sans revivre de tout son être, et se sentir réchauffé par l’Esprit ? Bien plus, « mon cœur et mes os ont tressailli d’allégresse pour le Dieu vivant » alors que, voyant Jésus mort, j’avais été complètement abattu par la tristesse et le désespoir ! Ce n’est pas un médiocre accroissement de foi, une petite augmentation de joie, de voir Jésus sortir pour moi du tombeau ! Je le reconnais Dieu vivant, celui que, peu avant, nous pleurions comme on pleure un mort. Mon cœur se lamentait parce qu’on l’avait tué, et voici qu’en lui, maintenant, tressaillent de joie non seulement mon cœur, mais aussi ma chair, assurée par lui de sa résurrection et de son immortalité. Ô mon âme : « J’ai dormi et je me suis levé » dit le Christ. Toi aussi, lève-toi, « toi qui dors, réveille-toi d’entre les morts, et le Christ t’illuminera ».

Mes frères, n’est-il pas semblable à un mort, celui qui dort encore alors que déjà le soleil s’est levé, celui qui est encore accablé par la négligence et l’insouciance, et comme enseveli dans une sorte de torpeur sans espérance, alors que partout brille la grâce de la Résurrection ? Le soleil nouveau, sortant des enfers, frappe les yeux de ceux qui veillent pour lui dès le matin, leur ouvrant le jour de l’éternité. Ce jour-là ne connaît pas de soir, car son soleil ne se couchera plus ; s’étant couché une fois pour toutes, il monte, une fois pour toutes, au-dessus de tout couchant, en se soumettant la mort. Ô mes frères, « Voici le Jour que le Seigneur a fait, tressaillons d’allégresse et réjouissons-nous en lui ». Tressaillons d’allégresse en l’espérant, afin de le voir et de nous réjouir de sa lumière. Abraham exulta dans la pensée de voir le jour du Christ ; il mérita ainsi de le voir et il s’en réjouit.

Car toi aussi, si tu veilles tous les jours aux portes de la Sagesse, si tu fais le guet sur le seuil de sa demeure, si, avec Madeleine, tu veilles sans dormir devant la pierre du tombeau, alors, j’en suis sûr, tu éprouveras avec cette Marie, combien est vrai ce qu’on lit de la Sagesse qui est le Christ : « Ceux qui la chérissent la contemplent sans peine, elle se laisse trouver par ceux qui la cherchent. Elle va au-devant de ceux qui la désirent pour se montrer à eux la première. Quiconque veillera dès le point du jour pour l’attendre n’aura pas trop de peine, car Il la trouvera assise à sa porte. » Oui, le Seigneur lui-même a fait semblable promesse : « J’aime ceux qui m’aiment, et ceux qui veillent dès le matin pour moi, me trouveront. » C’est ainsi que Marie, venue au tombeau tandis qu’il faisait encore nuit, trouva Jésus corporellement présent, lui pour qui elle veillait. Mais toi, qui ne dois plus connaître Jésus selon la chair, mais selon l’Esprit, tu pourras néanmoins le trouver spirituellement, si tu le cherches avec un semblable désir, s’il te voit, comme elle, veiller dans la prière. Avec l’espérance et l’amour de Marie, dis donc au Seigneur : « Mon âme t’a désiré pendant la nuit et mon esprit au fond de mon cœur ; dès le matin je veillerai pour toi. » Dis avec les accents et le cœur du psalmiste : « Dieu, mon Dieu, mon âme te cherche dès l’aurore, mon âme a soif de toi. » Vois enfin s’il ne te serait pas donné de chanter avec l’un ou l’autre : « Dès le matin nous sommes comblés de ta miséricorde, nous avons été dans la joie et nous avons goûté le bonheur. »





Sermon 3 pour la résurrection, n° 1 et 2 (extraits). Cf. Guerric d’Igny, Sermons 2 (Sources chrétiennes, 202), Paris, 1973, p. 247-251.