Jésus vit, cela me suffit — Avec Benoît et les Pères cisterciens

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Jésus vit, cela me suffit

Quand Jacob vit tout ce que Joseph lui avait envoyé, son esprit se ranima, et il dit : « Mon fils vit, cela me suffit; j'irai et le verrai avant de mourir ». Ainsi en fut-il des apôtres : les paroles eurent peu d'influence sur eux, tant qu'ils ne reçurent pas ses dons. Car lorsque Jésus se présenta devant eux, il les persuada que c'était bien lui, moins en leur montrant son corps qu'en leur insufflant son don. Vous le savez, lorsque Jésus vint à ses apôtres, les portes closes, et se tint au milieu d'eux, ceux-ci furent troublés et effrayés, croyant voir un fantôme. Mais lorsqu'il souffla sur eux en disant : « Recevez l'Esprit Saint », et qu'il leur envoya du ciel ce même Esprit comme un don nouveau, ce don fut un témoignage indubitable de sa résurrection et de sa vie. C'est en effet l'Esprit qui témoigne dans le cœur des saints et, par leur bouche, que le Christ est la vérité, la vraie résurrection et la vie.

Maintenant donc, mes frères, quel témoignage la joie de vos cœurs rend-elle à votre amour du Christ ? Pour moi, voici ce que je pense, à vous de voir si j'ai raison : si jamais vous avez aimé Jésus, vivant, mort, puis revenu à la vie, en ce jour où dans l'Église tant de messagers proclament sa résurrection, votre cœur exulte et s'écrie : « On me l'a annoncé, Jésus, mon Dieu, est vivant ! Voici qu'à cette nouvelle mon esprit, assoupi de chagrin, se ranime, lui qui languissait dans la tiédeur et tombait dans le découragement. » Car la douce voix qui apporte cet heureux message, réveille de la mort les coupables eux-mêmes.

À ceci tu reconnaîtras avec certitude que ton esprit revit pleinement dans le Christ, s'il dit du fond du cœur : « Jésus vit, cela me suffit. » Cri de foi bien digne des amis de Jésus ! Amour très chaste qui s'exprime ainsi : « Jésus vit, cela me suffit. » S'il vit, je vis, car mon âme est suspendue à lui. Bien plus, il est ma vie et mon tout. Que peut-il me manquer si Jésus est vivant ? Bien plus : que tout le reste me fasse défaut, peu m'importe pourvu que Jésus soit vivant. Que lui même soit loin de moi, si tel est son bon plaisir, il me suffit qu'il vive, lui, ne fût-ce que pour lui même". Quand l'amour du Christ absorbe toute l'affection de l'homme au point que, se reniant et s'oubliant lui même, il ne soit plus sensible qu'à Jésus Christ et à ce qui le concerne, alors, à mon avis, la charité est parfaite en lui. Pour l'homme ainsi disposé, la pauvreté n'est plus un fardeau. Il est insensible aux injures, il se rit des brimades, il ne craint aucun dommage, la mort lui semble un gain. Ou plutôt il pense ne jamais mourir, car il sait qu'il passera de la mort à la vie, et il s'écrie avec confiance : « J'irai et je le verrai avant de mourir. »

Sermon 1 pour la Résurrection du Seigneur, -35 (extraits).
Cf. Guerric d’Igny, Sermons 2 (Sources chrétiennes, 202), Paris, 1973, p. 223-227.